Catégorie "Reportages: Espèces"

12 mai 2016  |  3 Commentaires  |  

Trois mois, trois semaines et 3 jours après avoir été fécondées, au début du mois de mai, la laie se retire de la compagnie pour rejoindre un secteur isolé et plus calme de la forêt. À l’aide de végétaux, fougères et petites branches d’arbres, elle construit un nid qu’on appelle « chaudron ». Elle met alors au monde entre 2 et 6 jeunes selon le poids l’âge de la mère. À la naissance, les  marcassins présentent une robe rayée beige et marron clair.

sanglier 4

sanglier 1

Ils restent 10 jours environ au chaudron avant de sortir, et c’est seulement au bout de 3 semaines qu’ils suivront leur mère dans ses déplacements et rejoindre le reste de la compagnie. Les marcassins ne seront sevrés qu’à l’âge de trois mois.

sanglier 3

sanglier 2

 

Pendant cette période, la compagnie fait office de nurserie et les petits restent sous la vigilance des différentes laies. C’est le temps de l’apprentissage. Les jeunes passent l’essentiel de leur temps à jouer, simuler des joutes parfois violentes et impressionnantes, probablement pour instaurer une hiérarchie, mais aussi s’initier à la recherche de nourriture avec leur groin … le tout entrecoupé de siestes et de toilettage. Les marcassins sollicitent souvent leur mère en tentant d’atteindre les mamelles mais ils sont souvent rejetés. Le moment venu de la tétée, la laie se couche sur le flanc et les jeunes se disputent l’accession aux meilleures mamelles, celles probablement qui produisent le plus de lait. Dans une compagnie constituée plusieurs laies suitées, les tétées sont souvent synchronisées.

 

sanglier 5

sanglier 6

30 mars 2016  |  1 Commentaire  |  

Le triton palmé (Lissotriton helveticus) est le plus petit de nos tritons et probablement également le plus répandu. Cet urodèle se rencontre surtout dans les habitats forestières et de landes. Comme la plupart des tritons, le palmé passe l’hiver sur la terre ferme caché dans le sol ou sous des souches même si certains individus peuvent également hiverner sous l’eau.

En fin d’hiver, lors des nuits humides et douces, les tritons regagnent les mares, étangs voir même des ornières forestières pour se reproduire. Les mâles sillonnent alors les points d’eau à la recherche d’une femelle. La parade nuptiale est assez spectaculaire et complexe. Le mâle effectue alors une sorte de danse pour séduire la femelle. En suspension dans l’eau avec les pattes postérieures palmées, il tourne autour de la femelle en effectuant des mouvements avec sa queue. Il n’y a pas de contact direct avec le partenaire et cette parade permet de libérer des phéromones sexuelles.

Lors de l’accouplement, le mâle dépose une capsule dans le cloaque de la femelle appelée spermatophore  qui contient les spermatozoïdes. La femelle déposera ensuite les œufs fécondés un à un sur la végétation.

Toutes ces images subaquatiques ont été réalisées en milieu naturel avec des tritons libres sans utilisation d’aquarium.

triton palme 1

triton palme 2

triton palme 3

triton palme 4

triton palme 5

Le sol constitue l’un des trois habitats les plus diversifiés de la planète avec les fonds marins et la forêt équatoriale. Mais malheureusement cette biodiversité est menacée par les diverses activités humaines et les changements climatiques.

Le sol subit ainsi d’importantes contraintes avec l’intensification des pratiques agricoles mais aussi forestières (tassement des sols, érosion, pollution, déforestation …). Les conséquences sont alors majeures sur la biodiversité, une baisse de diversité due au fait que les organismes vivants n’ont pas le temps de se déplacer ou de s’adapter à ces changements brutaux !

ambiance automne

Les ingénieurs des écosystèmes sont définis comme des organismes qui physiquement modifient, maintiennent ou créent des habitats. Dans le sol, une multitude d’espèces participent à la dégradation de la matière organique de surface et son intégration dans les horizons inférieurs du sol.

collembole 2

Collembole Dicyrtomina sp.

glomeris

Gloméris sp.

Ainsi lorsqu’une feuille à l’automne tombe au sol, celle-ci va subir les attaques de l’eau puis les ingénieurs du sol vont progressivement réduire la feuille en petits fragments pour au final après un long processus libérer divers éléments minéraux nutritifs (carbone, azote, phosphore …) indispensables à la croissance des plantes.

Les champignons attaquent dans un premier temps la surface de la feuille fragilisant alors les tissus. Puis les collemboles rentrent en action pour détruire l’épiderme de la feuille tout en mangeant aussi des champignons  et des larves de diptères vont ensuite agrandir les ouvertures.

champignon

Développement de champignons

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Mycélium de champignons et collembole

galerie diptère

Galerie de larve de diptère

collembole 6

Collembole Entomobrya sp.

Dans un second temps, des espèces plus grandes appartenant au groupe des macro-arthropodes (Isopodes, Myriapodes) vont poursuivre cette déstructuration de la feuille en s’attaquant aux parties plus résistantes que sont les nervures. La feuille devenue un squelette, les fragments sont alors à nouveau consommé par des Nématodes, collemboles et acariens oribates.

iule

Myriapode Diplopode iule

polydesme

Myriapode Diplopode polydesme

collembole 4

Collembole sur feuille dégradée par les divers arthropodes

cloporte

Isopode cloporte

oribate 2

Acarien oribate

La dernière étape consiste dans l’incorporation de ces fragments et éléments nutritifs dans le sol et c’est à ce stade que le vers de terre  rentre en action. Non seulement ce champion des ingénieurs du sol participe à l’enrichissement naturel du sol mais aussi à la régulation des eaux avec ses galeries et à l’aération des sols.

vers de terre

Profil de sol avec vers de terre

11 novembre 2015  |  21 Commentaires  |  

 A l’heure où dans les forêts françaises le brame du cerf se termine, l’avenir du plus grand de nos cervidés est en danger dans nos massifs domaniaux. La politique actuelle des dirigeants de l’ONF va dans le sens d’une forte diminution des populations de cervidés. Cette situation pourrait être acceptable si en effet nous étions dans une phase de fort développement des populations. Or il en est rien ! De nombreuses forêts sont déjà sur la liste noire où  les naturalistes et même les chasseurs s’inquiètent de cette situation : forêts de Eawy, Halatte, Compiègne, Mormal, Rambouillet, Sillé le Guillaume, Perseigne ….  un simple exemple, en forêt de Sillé le Guillaume située en Sarthe, les comptages du printemps dernier ont révélé la présence de 26 grands cervidés sur 3376 ha ! Evidemment ce n’est qu’une estimation mais est ce normal d’arriver à un tel niveau  ?  Alors pourquoi continuer cette politique ?

cerf 1

Une mauvaise interprétation des chiffres ? Pour cautionner cette politique, l’ONF s’appuie sur une étude menée par le ministère de l’agriculture relatant que les populations de cerfs ont quadruplé durant les 25 dernières années. Or ce chiffre ne reflète pas la réalité de terrain et de nombreux acteurs pourront le confirmer aisément. L’expansion du cerf s’est accrue en 25 ans en colonisant de nouveaux territoires et il est possible que localement certaines populations se soient donc fortement développées mais est ce la réalité sur l’ensemble des massifs domaniaux ?  Chaque massif est un cas particulier et nécessite donc la mise en place d’une réflexion locale adaptée !  Par contre ce qui est certain c’est que le nombre de cerfs déclarés tuées a été multiplié par 4 durant les 20 dernières années (9358 en 1984-1985 contre 39721 en 2004-2005 selon les sources de l’article publié dans la revue « Connaissance de la chasse, mai 2015). Or un accroissement du nombre de cerfs prélevés ne signifie pas forcément que le nombre d’animaux a augmenté ! Bien au contraire puisque depuis plusieurs années, nous voyons les populations décroitre localement !

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La peur de voir exploser les populations ? Cela n’a aucun sens puisque dans la majorité des massifs des comptages sont réalisés au printemps et avec un faible taux de reproduction de 1 faon par an (fort différent de celui des sangliers), cela semble difficile de se retrouver dans cette situation du jour au lendemain !

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Des pressions économiques ?  L’ONF rencontre des difficultés financières et doit rétablir l’équilibre de ses comptes. Il faut donc accroitre la rentabilité des forêts ! D’ailleurs les coupes forestières s’accélèrent ces dernières années laissant place à de grandes surfaces de régénération.  Alors pourquoi faire des aménagements sur ces zones de régénérations pour limiter l’impact de la faune  (protection  ou création de prairies qui représentent un coût)  si on peut mettre en place une solution plus simple et radicale ? En 2012 lors d’un échange avec un agent forestier de l’ONF sur Bercé, celui-ci me disait qu’il n’y avait plus de dégâts significatifs sur la régénération forestière … et pourtant on continue à appliquer cette politique … le nombre de biches à prélever ne cesse d’augmenter  !  Comme si la décision était prise dans les bureaux sans tenir compte de la réalité du terrain …. Sommes nous dans une société de tolérance zéro guidée uniquement par les enjeux financiers ? …. malheureusement oui !

Sachez également que la loi d’avenir agricole de septembre 2014 soumet dorénavant la gestion du grand gibier aux intérêts financiers sylvicoles. La porte est donc grande ouverte pour poursuivre cette politique dévastatrice !

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Les dégâts sur les cultures ? Il est également souvent  évoqué comme  argument à cette politique les dégâts sur les cultures avoisinantes aux forêts. Il est impossible de nier que localement il puisse y avoir des dégâts sur les cultures. D’ailleurs un système d’indemnisation est mis en place pour cela.  Là aussi, il est étonnant d’entendre un responsable de la gestion du cerf sur Bercé indiquer que 75% des dégâts sont attribués aux sangliers ! Dans ce cas, pourquoi poursuivre cette politique sur le cerf ? Pour diminuer les impacts sur les cultures, pourquoi ne pas mettre en place des systèmes de protection adaptés (qui existent déjà en théorie mais souvent non installés) et surtout pourquoi ne pas déjà arrêter de nourrir artificiellement les sangliers ?

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Une biodiversité forestière en péril ! Rien de nouveau à cela malheureusement ! Le cerf n’est qu’une n ième espèce qui s’ajoute à la longue liste. Evidemment cette espèce ne va pas disparaitre du territoire mais doit on se satisfaire pour autant de cette situation ? Le cerf appartient à la biodiversité forestière et participe également au fonctionnement de cet écosystème. La biodiversité ne doit pas se cantonner  à des réserves naturelles ou au bout du monde.  La biodiversité est partout et surtout à nos portes ! La biodiversité n’a pas de valeur marchande et c’est bien là le problème. Rien ne nous oblige à la conserver si ce n’est une obligation morale de transmettre aux générations futures ce patrimoine naturel.

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Comme le souligne Guy Bonnet, spécialiste du cerf en France,  dans un plaidoyer pour le cerf … le cerf est RES NULLIUS … c’est à dire qu’il appartient à personne et aucune catégorie d’intérêts ne peut décider seule de son avenir !

Je vous invite vivement à lire le sujet « Cerf : réelles menaces » publié dans connaissance de la chasse (mai 2015) – échanges entre Guy Bonnet et un haut responsable de l’ONF.

 

C’est l’histoire d’un cerf surnommé « bois tordus » suivi depuis trois années sur l’île Jura en Ecosse.

2012 … sur les hauts plateaux tourbeux , « bois tordus » domine sa place de brame avec vigueur pour écarter les concurrents et garder le contrôle de sa harde.

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2013 ….  une année plus tard, « bois tordus » est toujours un très beau cerf adulte maitre incontesté du harem de biches qui occupent cette petite prairie de fond de vallée.

 

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2014 … une nouvelle saison de brame débute pour « bois tordus ». C’est toujours une grande satisfaction de retrouver un cerf qu’on connait depuis maintenant trois ans. Toujours fidèle au poste, « bois tordus » contrôle toujours et encore sa place de brame et le harem de biches de la petite prairie. En journée il rejoint une autre harde qui se remise sur les hauts plateaux tourbeux. Le soir venu, il descend dans la vallée récupérer son harem. « Bois tordus » semble vouloir contrôler cette année les deux hardes des hauts plateaux et de la vallée.

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En cette semaine de la mi-octobre, « bois tordus » est en pleine saison de reproduction. Les phéromones émises par la biche en chaleur attirent « bois tordus » et déclenchent des comportements d’accouplement. La biche réceptive semble être prête à accepter les faveurs du maitre.

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Deux jours plus tard après avoir observé et photographié « bois tordus » sur les hauteurs, le soir venu, le maitre descend vers la vallée pour rejoindre son harem. Comme souvent un jeune cerf avait profité de son absence de la journée pour prendre le contrôle de la harde. Mais ce soir là, le jeune cerf ne semblait pas vouloir laisser sa place et la seule issue possible était alors un duel entre les deux prétendants.

 

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Une violente joute s’engage alors entre les deux cerfs avec des phases de repos tête contre tête et des phases où les deux cerfs, arque-boutés sur les membres postérieurs, tentent de déstabiliser l’adversaire. Le combat est équilibré et après un quart d’heure, aucun des deux protagonistes ne semblent fléchir et céder sa place … puis …. peut être sous l’effet de la fatigue où suite à un mauvais appui au sol,  « bois tordus » disparait de ma vue et se retrouve au sol. Le jeune cerf profita alors de ce moment de faiblesse pour enfourcher à deux reprises « bois tordus » avant de se retourner et rejoindre le harem de biches.

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Plaqué au sol,  haletant, « bois tordus » essaie de se redresser sur ses pattes antérieures mais, impossible, son postérieur semble touché … au moment de sa chute, sa colonne vertébrale a du être touchée. La nuit tombe et nous devons quitter la zone avec une multitude d’interrogations sur l’avenir de ce cerf. « Bois tordu » semble désormais condamné …

Le lendemain matin, nous revenons sur le secteur pour découvrir la macabre scène … « bois tordu » n’est plus ….

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Le jeune cerf au corps massif est désormais le nouveau maitre de place.

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Après discussion avec un Ecossais, « bois tordus » dominait la place depuis probablement 4 ans et devait être âgé d’environ 12 ans. Nous venions d’être témoin d’une expérience naturaliste à la fois rare et exceptionnelle. Cette scène de vie démontre que la nature n’a aucune pitié et seul le plus fort a sa place pour engendrer une descendance et ainsi transmettre  ses gènes à la génération future. La sélection naturelle a encore joué son rôle !

 

Cette séquence a été réalisée au cours de trois voyages sur l’île Jura dont les deux derniers lors de stage Photo Nature organisés par l’association Eresus-Nature (accompagnateurs : David Greyo et Christophe Salin).

http://christophesalin.com/stages/